Accès à la formation : pourquoi souhaiter se former ne suffit pas
Commentaires fermés sur Accès à la formation : pourquoi souhaiter se former ne suffit pasL’étude réalisée par Camille Stéphanus au Céreq explore l’accès à la formation professionnelle dans les entreprises françaises, révélant que si la majorité des salariés aspirent à se former, la concrétisation de ces aspirations dépend fortement du contexte organisationnel de leur entreprise.
La recherche de Camille Stéphanus au Céreq, portant sur la formation professionnelle en entreprise, explore les dynamiques d’accès à la formation professionnelle dans le cadre de l’enquête Defis. Ce travail de recherche s’inscrit dans la continuité de la loi du 5 septembre 2018 pour la liberté de choisir son avenir professionnel, qui vise à sécuriser les parcours professionnels par le développement des compétences.
L’étude souligne l’importance de l’initiative individuelle dans le développement professionnel et s’interroge sur les conditions qui permettent ou entravent la concrétisation des aspirations à la formation. Elle révèle que les aspirations à se former sont présentes à tous les niveaux de qualification, mais que la capacité de transformer ces aspirations en démarches concrètes varie significativement selon les catégories socioprofessionnelles.
L’enquête Defis montre que bien que 71% des salariés envisageaient de se former entre 2014 et 2019, seuls 62% de ceux exprimant ce souhait ont effectivement suivi une formation. Ce chiffre tombe à 50% pour ceux qui n’ont pas exprimé de souhait de formation. Ces résultats illustrent un décalage notable entre l’aspiration à la formation et l’accès effectif à celle-ci, surtout chez les salariés peu qualifiés.
L’étude identifie plusieurs facteurs influençant la formation des aspirations à se former. Le contexte organisationnel de l’entreprise, notamment la stabilité de l’emploi et le caractère formateur de l’entreprise, joue un rôle crucial. Les salariés en CDI ou dans des entreprises investissant activement dans la formation ont significativement plus de chances de développer des aspirations à se former. En particulier, les entreprises qui consacrent entre 1 et 3% de leur masse salariale à la formation augmentent les chances de leurs employés de vouloir se former.
Le rôle des processus d’information et de délibération dans l’entreprise est également central. Les salariés qui ont participé à un entretien professionnel sont beaucoup plus susceptibles de suivre une formation que ceux qui n’ont pas eu cet entretien. De même, être informé des possibilités de formation par la direction ou le service des ressources humaines augmente la probabilité d’accès à la formation.
L’analyse économétrique de l’étude révèle que l’aspiration à se former et l’accès à la formation sont des variables endogènes, nécessitant une modélisation à deux équations simultanées pour évaluer correctement leur relation. Cela démontre que des caractéristiques observables et non observables influencent à la fois le souhait et la possibilité de se former.
En dépit de l’impact positif des aspirations sur l’accès à la formation, l’étude révèle que les inégalités persistantes d’accès à la formation entre les salariés qualifiés et non qualifiés demeurent préoccupantes. Les salariés peu qualifiés, même lorsqu’ils expriment un souhait de formation, ont toujours moins de chances d’accéder à des formations que leurs collègues plus qualifiés.
L’étude conclut sur la nécessité pour les entreprises d’investir davantage dans la formation et de fournir des espaces de délibération et d’information pour aider tous les salariés à concrétiser leurs projets de formation. Elle met en lumière l’importance de contextes organisationnels favorables et d’un accompagnement approprié pour transformer les aspirations en réalités concrètes, et appelle à une responsabilisation accrue des entreprises dans la réduction des inégalités d’accès à la formation.
Sources: Céreq Bref, 451|2024 Bulletin de recherches emploi formation https://www.cereq.fr/acces-formation-professionnelle-souhait